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Introduction.

pas, mais est pensée. Il ne veut pas, mais est la loi. — De lui émane, avec son être, le destin de chaque être. Dans la nature issue de lui, certains points spéciaux sont comme des pôles de sa vertu émanatrice. Du ciel émane la vertu fécondante, de la terre émane la vertu productrice. Des astres anodes célestes, des monts cathodes terrestres, s’échappent des effluves spéciales. Ces forces sont bienfaisantes, quand elles sont normales, chenn développées dans la direction imprimée par le Principe au cosmos. Elles sont malfaisantes, quand elles sont koai anormales, désorientées, déviées[1]. — Dans chaque être, minéral, végétal, animal, homme, quel qu’il soit, est contenue une âme, participation du Principe universel, principe de sa nature particulière et de ses propriétés spéciales. Avec l’âge, toute âme s’élève, sa vertu s’exagère et déborde son degré. L’âme d’un vieil objet acquiert une certaine raison, l’âme d’un vieil arbre agit dans un certain rayon, l’âme d’un vieil animal pense presque comme un homme, l’âme d’un vieillard pénètre l’espace et le temps. C’est l’expérience acquise, la connaissance emmagasinée, qui font ces progrès. Les âmes qui n’ont rien appris, retournent, à la mort, dans le grand tout inconscient. Celles qui ont appris quelque chose, transmigrent, en fonction de leur connaissance acquise. Les âmes humaines qui ont beaucoup appris, peuvent subsister pour un temps, dans un revêtement de matière éthérée, avant leur réincarnation. Celles qui ont appris le grand secret, tat-tvam que tout est un, celles-là échappent à la métempsycose et rentrent dans le Principe conscient. — Tout étant un, il n’y a pas de distinction spécifique entre le bien et le mal. L’identité des contraires est enseignée, par les Pères du Taoïsme, avec une insistance qui touche à l’acharnement. Ils n’enseignent donc pas comment faire le bien et éviter le mal, puisqu’ils ne connaissent ni bien ni mal. D’après eux, l’homme n’a qu’un grand devoir, s’unir au Principe primordial dont il est une terminaison temporaire, vouloir ce que le Principe veut, et faire ce que le Principe fait. D’où les conséquences suivantes :

1. Le Principe l’ayant fait pensant, l’homme doit penser le plus possible, méditer, approfondir. Non pour acquérir des connaissances multiples et variées. Mais pour s’approprier, au degré le plus intense possible, cette connaissance globale unique, qu’il est un avec le Principe, qu’il est le Principe, que tout est le Principe ; qu’il suffit donc d’appliquer son attention à ce centre, ignorant les points de la périphérie, les individus et les détails.

2. Le Principe l’ayant investi de sa gangue corporelle et lui ayant déterminé un nombre fixe d’années, l’homme doit faire ce qu’il faut, pour que son corps vive jusqu’au bout de ce nombre d’années ; pour que la mort ne survienne pas avant le temps, par suite de l’usure prématurée de la matière. Autrement son âme avortée, descendra dans l’échelle, deviendra un monstre, ou rentrera même dans le tout non-pensant. — De là le culte des Taoïstes pour l’hygiène ; leur intérêt pratique pour les questions relatives au régime et à la diététique ; pour la médecine, la pharmacie. — De là aussi la morale

  1. Électricité, courants, ondes, vibrations, ions, radio-activité ; mesmérisme, hypnotisme, émission de fluides, influence à distance, télépathie, presque tout ce que les occultistes et les spirites ont élucubré ; tout cela paraît aux Taoïstes tout naturel ; vertus émanantes ; pour eux le monde en est plein.