Page:Leon Wieger Taoisme.djvu/534

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G. Toan-mouchou de Wei, riche contemporain de Tzeu-koung, employa la grande fortune amassée par ses ancêtres, à faire plaisir à soi et aux autres. Bâtiments, jardins, mets, costumes, musique, harem, pour tout cela il éclipsa les princes de Ts’i et de Tch’ou. Il satisfit, pour lui et pour ses hôtes, tous les désirs du cœur, des oreilles, des yeux, de la bouche, faisant venir à cette fin les objets les plus rares des pays les plus lointains. Il voyageait avec le même luxe et les mêmes commodités. Les hôtes affluaient chez lui par centaines, le feu ne s’éteignait jamais dans ses cuisines, la musique ne cessait jamais de retentir dans ses salles. Il répandit le surplus de ses richesses, sur ses parents, sur ses concitoyens, sur son pays. Il soutint ce train durant soixante années. Alors sentant ses forces l’abandonner et la mort approcher, en un an il distribua en cadeaux toutes ses possessions, n’en donnant rien à ses enfants. Il se dépouilla si bien, que, dans sa dernière maladie, il manqua des médicaments nécessaires, et plus, après sa mort, l’argent pour ses funérailles fit défaut. Ceux lui avaient bénéficié de ses largesses, se cotisèrent alors, l’ensevelirent, et constituèrent un pécule à ses descendants. ... Que faut-il penser de la conduite de cet homme ?.. K’inn-kou-li jugea qu’il se conduisit en fou, et déshonora ses ancêtres. Toan-kan-cheng jugea qu’il se conduisit en homme supérieur, et fut beaucoup plus sage que ses économes ancêtres. Il agit contrairement au sens vulgaire, mais conformément au sens supérieur. Ce prodigue fut plus sage que tous les princes de Wei morigénés. (Ainsi juge l’épicurien Yang-tchou).