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Chap 33. Écoles diverses.

A.   Bien des recettes pour gouverner le monde ont été inventées par différents auteurs, chacun donnant la sienne pour la plus parfaite. Or il s’est trouvé que toutes étaient insuffisantes. Un seul procédé est efficace, laisser agir le Principe, sans le contrecarrer. Il est partout, il pénètre tout. Si les influx transcendants descendent du ciel et montent de la terre, si des Sages sont produits, c’est grâce à lui, immanent dans le tout universel. Plus son union avec le Principe est étroite, plus l’homme est parfait. Les degrés supérieurs de cette union font les hommes célestes, les hommes transcendants, les sur-hommes. Puis viennent les Sages, qui savent spéculativement que le ciel, manifestation sensible du Principe, est l’origine de tout ; que son action est la racine de tout ; que tout sort du Principe, par voie d’évolution, et y retourne. Enfin les princes appliquent pratiquement ces idées, par leur bonté bienfaisante, leur équité rationnelle, les rits qui règlent la conduite, la musique qui produit l’entente, un parfum de bienveillance qui pénètre tout. Ainsi firent les princes de l’antiquité, conseillés par leurs sages. Ils distinguèrent les cas, et leur appliquèrent des lois. Ils qualifièrent et dénommèrent. Ils approfondirent toutes choses par la considération et l’examen. Enfin, tout étant mis au clair, ils prirent des mesures réglées comme un deux trois quatre. Depuis lors l’engrenage des officiers fonctionna. les affaires suivirent leur cours, le soin du peuple devint la grande affaire, l’élevage du bétail fut encouragé ; les vieillards et les enfants, les orphelins et les veuves, devinrent l’objet d’une grande sollicitude ; tout ce qu’il fallait faire raisonnablement pour le bien commun fut fait. En prenant cette peine, les anciens collaboraient avec les influx transcendants célestes et terrestres, avec l’action du ciel et de la terre. Ils nourrissaient les vivants, maintenaient la paix, étendaient leurs bienfaits à tous. Des principes parfaitement pénétrés, ils tiraient des applications variées, agissant dans toutes les directions, sur les êtres les plus divers. Les vieilles lois transmises d’âge en âge, conservées encore en grand nombre dans les histoires, témoignent de la science théorique et pratique des anciens. — Puis vinrent les Odes, les Annales, les Rits, les traités sur la musique, des lettrés de Tseou et de Lou, des maîtres officiels des principautés. Dans leur idée, les Odes sont un code de morale, les Annales un répertoire de faits, les Rits une règle de conduite, la musique un moyen pour produire la concorde, les mutations un procédé pour connaître les mouvements du yinn et du yang, les chroniques un moyen de distinguer les réputations vraies des fausses. Répandus des provinces centrales dans tout l’empire, ces écrits devinrent le thème sur lequel les lettrés s’exercèrent. — Puis vint un temps où l’empire étant tombé dans un grand désordre et étant dépourvu de grands sages, d’autres principes furent inventés, les discussions commencèrent, et chacun prétendit avoir raison. Ce fut comme la dispute des oreilles et des yeux avec le nez et la bouche, qui ne purent jamais s’accorder, chaque sens ayant raison, mais quant à son objet propre seulement. Ainsi les diverses écoles ont chacune sa spécialité, bonne en temps et lieu ; mais aucune n’embrassant tout n’a le droit d’exclure les autres. Comment un seul lettré, tapi