Page:Leopardi - Poésies complètes, trad. Vernier, 1867.djvu/147

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et de lui faire oublier la triste condition humaine : ils ne peuvent rien d’antre pour lui. Mais pourquoi mettre au jour, amener dans la vie un être qu’il faut ensuite consoler de l’existence ? Si la vie est un malheur, pourquoi la perpétuer de notre fait ? Astre charmant, telle est la condition des mortels. Mais tu n’es pas mortelle, toi, et peut-être te soucies-tu médiocrement de ce que je te dis là.

Cependant, voyageuse solitaire et éternelle, qui parais si pensive, peut-être as-tu le secret de notre existence terrestre, de nos souffrances, de nos soupirs; peut-être sais-tu ce que c’est que mourir ; mourir, ce suprême effacement de l’existence, cette dissolution qui atteint tout sur la terre, tu comprends peut-être cela, chère compagne de mes nuits. Certainement tu dois savoir le pourquoi des choses, la cause du matin, du soir, de la marche infinie et muette du temps. Tu sais certainement à quels doux amours sourit le printemps, à quoi sert la chaleur, et ce que veut l’hiver avec ses glaces. Tu sais mille choses, tu t’expliques mille faits qui sont mystères pour un simple ber-