Page:Lepelletier - Émile Zola, 1908.djvu/183

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journal, ce qui n’était pas le cas. Ensuite l’éditeur Lacroix, un excellent homme, mais légèrement aventureux et fortement imprévoyant, s’était engagé dans des entreprises honorables, malheureusement, pour la plupart, aléatoires et onéreuses. Il avait payé très cher le droit d’éditer les Misérables. Victor Hugo avait touché 500.000 francs, rien que pour la première édition, format in-8°. Grand admirateur de Proudhon, Lacroix avait entrepris la publication des œuvres complètes du puissant philosophe, qui, sauf quelques ouvrages, se vendirent peu. L’intéressante publication de la collection des Grands Historiens étrangers, Gervinus, Motley, Mommsen, Draper, Prescott, etc., avait donné peu de résultats immédiats. Lacroix se trouvait donc obéré, à la fin de la guerre. L’interruption des affaires avait aggravé sa situation commerciale déjà embarrassée. Il eut avec Zola un compte de billets, qui, renouvelés, impayés, accrus d’agios et de frais, formèrent un total important, au moment de la faillite Lacroix. Grâce à la loyauté des deux parties, tout s’arrangea au mieux et à l’amiable. Le compte de Zola avec son premier éditeur fut définitivement soldé en 1875. Un libraire jeune, intelligent et très camarade avec ses auteurs, Georges Charpentier, racheta de Lacroix, moyennant huit cents francs, la Fortune des Rougon et la Curée. Un nouveau traité fut rédigé. L’éditeur payait comptant chaque roman trois mille francs. Devenu propriétaire du manuscrit, il pouvait le publier ou le faire reproduire dans les journaux, et cela pendant dix ans, ce traité, bien que rédigé de très bonne foi, était aléatoire pour les deux parties. Les manuscrits étaient trop payés, si une seule édition s’écoulait. Ils ne l’étaient pas assez, si ces romans se vendaient bien en librairie,