Je gagne de l’argent avec vos ouvrages, me dit-il, et il est juste
que vous ayez votre part dans les bénéfices. Ce n’est plus six mille
francs que je vous offre annuellement, mais une remise de cinquante
centimes par volume vendu. À ce compte-là, le seul que j’accepte,
c’est vous qui êtes mon créancier : il vous est redû la somme assez
ronde de douze mille francs, que vous pouvez toucher. La caisse est
ouverte !…
On conçoit de quel pied joyeux Zola descendit à la caisse pour palper ce
boni inattendu. De débiteur il passait créancier ! Quel allégement ! En même
temps qu’il se libérait, il encaissait, et, ce qui était plus précieux
encore, il acquérait un bon et véritable ami. L’inaltérable affection
mutuelle de Georges Charpentier et de Zola, de l’auteur et du libraire,
est à envier et à montrer en exemple.
Bien que vivant modestement, Zola, en attendant la publication et
la réussite de ses romans, ne pouvait demander qu’au journalisme le
supplément de ressources qui lui était nécessaire, durant ces trois années
difficiles, 1869-1870-1871. Écrire au jour le jour des articles n’était
pas une besogne qui lui fût difficile ou pénible. Nous savons que sa
première méthode de travail était la régularité. Bien qu’il n’ait été
qu’un journaliste intermittent, et qu’il ait considéré seulement la presse
comme un gagne-pain quotidien, et ensuite, l’aisance venue avec la
notoriété, comme un instrument puissant de propagande, comme une arme
incomparable de polémique, il doit être compté parmi les professionnels,
et en bon rang, du journal, au XIXe siècle. Il aimait le journalisme.
Il m’a fait à moi-même, en plusieurs circonstances, l’éloge de cette
profession ingrate, au labeur continu, aux succès éphémères. Il voulut
bien me complimenter, à diverses reprises, sur ce qu’il nommait ma
« virtuosité » . Il se rendait
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