Page:Lepelletier - Émile Zola, 1908.djvu/321

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

violent et le plus impressionnant des romans de Zola. Il est demeuré le plus notoire, sans être pourtant celui qui se soit le plus vendu. Mais, à coup sûr, c’est celui qui a attiré le plus d’injures à son auteur, par conséquent la plus grande célébrité. Toutes les pierres qu’on jette à un écrivain finissent par former un haut piédestal, sur lequel il se trouve tout naturellement hissé, et d’où il domine la foule. Un moment vient où les pierres ne l’atteignent plus, il est trop haut, et le lapidé devient le glorifié. Zola ignoré, et, ce qui pis est, méconnu, fut, du jour au lendemain, grâce à l’Assommoir, une puissance. Il connut la roche Tarpéienne à rebours : on le précipita, comme infâme, dans le gouffre, et il se trouva, comme par un miracle, relevé et transporté immédiatement au Capitole. La haine et la sottise se trompent heureusement parfois dans leurs calculs et dans leurs guets-apens. Zola n’eut pas une bonne presse, au lendemain de l’apparition de son livre. Elle fut, pourtant, excellente, mais, par surprise, et sans qu’il y eût, à cet égard, bonne volonté et complaisance intentionnelle. Aucune qualification désobligeante ne lui fut épargnée. On le proclamait roi de l’ordure et empereur des pourceaux. C’était, pour les uns, le plus dégoûtant des pornographes, et, pour d’autres, un insulteur d’ouvriers, bref un infâme, un scélérat, Zola-la-Honte ! Le plus répandu des journaux parisiens caractérisait ainsi l’œuvre et l’auteur : À l’encontre de ce personnage des Contes de fées qui changeait en or tout ce qu’il touchait, M. Zola change en boue tout ce qu’il manie…