Dans ce journal, très artiste, où Alphonse Daudet publia Sapho, et Guy
de Maupassant plusieurs nouvelles inédites, parmi lesquelles les Sœurs
Rondolli, et où Paul Bonnetain avait débuté, Henry Bauer s’exprima ainsi,
avec cette franchise brutale qui lui valut en maintes circonstances
beaucoup d’ennemis, mais qui caractérisait son talent sincère et
indépendant :
Tant pis pour Bonnetain ! Tant pis pour Descaves ! Vous avez fait là,
mes garçons, une vilaine besogne qui se retournera contre vous-mêmes.
Vous avez oublié que le peu que vous êtes, vous le lui devez ;
vous n’existez que par lui. Tout, votre forme, votre style, votre
vocabulaire, vos images, vos idées procèdent de son œuvre, et vos
pattes de mouches sont frottées à sa griffe. Vous êtes bien jeunes
pour être ingrats. Apprenez, mes petits, que toute la littérature
contemporaine a pris son essor dans ces Rougon-Macquart « ridicules » .
Vous mordez les talons du père qui vous a tous engendrés et vous
essayez d’ameuter le Philistin contre votre créateur, gare à la
mâchoire d’âne !
La correction était infligée de main de maître. Les quatre, car
l’instigateur de la réclame cherchée disparut bientôt, ont depuis fait
oublier cette incartade de jeunesse à force d’œuvres estimables.
L’un des signataires devait d’ailleurs, par la suite, faire des excuses
publiques qui honorent également celui qui les formulait si spontanément
et celui qui les acceptait avec une généreuse effusion.
M. Paul Margueritte écrivit à Zola, au moment de la publication de
la Débâcle, la lettre suivante :
9 mars 1892.
Cher monsieur Zola,
C’est avec émotion que je vois la division Margueritte et le nom de
mon père jouer un rôle dans la Débâcle. Je pressens que vous serez
sympathique aux efforts perdus de cette belle
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