Page:Lepelletier - Émile Zola, 1908.djvu/369

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préparé. Au commencement de l’ouvrage, déjà, un fardier s’était embarrassé sur la voie, et Flore, la jalouse Flore qui fait dérailler le convoi pour se venger, s’était essayée, en retenant des chevaux rétifs. La machine, décrite, détaillée, ayant l’importance d’un premier rôle, et quelques pages sur les rivalités d’employés, se disputant un logement, ou s’espionnant les uns les autres, font souvenir que le puissant auteur de la Bête Humaine, avant tout ce carnage, a décrit le comptoir formidable du père Colombe, la ruche ouvrière de la rue de la Goutte d’Or, la truculente obésité des halles, le puits dantesque du Voreux. La Bête Humaine n’est pas le meilleur roman de Zola. Je l’ai analysé, pour indiquer la féconde variété du maître, et pour prouver qu’il aurait pu, malgré l’insuccès de son début à Marseille, rivaliser avec les feuilletonistes populaires, ceux qui seuls semblent susceptibles de capter l’attention des foules. Il y a de nombreuses descriptions, très artistes, dans ce roman rouge. La rouge est la couleur de la vie. Il donne l’impression de la force et aussi de l’horreur, et, en fermant ce livre rude, on se souvient, avec Baudelaire, que le charme de l’horreur n’enivre que les forts. La Débâcle a paru en 1892. C’est peut-être le livre de Zola qui a suscité le plus de polémiques, inspiré le plus de sottes injures, celui aussi qui a été le moins compris, le plus calomnié. C’est son plus beau livre. Zola a été, sans raison, accusé d’avoir écrit un ouvrage anti-patriotique. Pourquoi ? Parce qu’il n’a pas montré les soldats de son pays, irrésistiblement victorieux, ou