Page:Lepelletier - Émile Zola, 1908.djvu/438

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mission. Il délivrerait Dreyfus et conduirait la France au sacre socialiste. Il brandirait l’étendard de la Liberté et l’épée de la Justice, et sur les ténèbres environnantes il secouerait la torche de la Vérité. Ce fut alors qu’il lança, comme un appel aux armes, sa fameuse Lettre au président de la République, Félix Faure. Ce réquisitoire mémorable, connu sous le nom de J’accuse ! parut dans l’Aurore, numéro du 13 janvier 1898, le lendemain même de l’acquittement d’Esterhazy. La « Lettre au président » avait été précédée de deux autres brochures. L’une « la Lettre à la jeunesse », l’autre « la Lettre à la France » . Dans cette dernière lettre, Zola, avec éloquence, s’écriait : Ceux de tes fils qui t’aiment et t’honorent, France, n’ont qu’un devoir ardent, à cette heure grave, celui d’agir puissamment sur l’opinion, de l’éclairer, de la ramener, de la sauver de l’erreur où d’aveugles passions la poussent. Et il n’est pas de plus utile, de plus sainte besogne. Ah ! oui, de toute ma force, je leur parlerai, aux petits, aux humbles, à ceux qu’on empoisonne et qu’on fait délirer. Je ne me donne pas d’autre mission, je leur crierai où est vraiment l’âme de la patrie, son énergie invincible et son triomphe certain. Voyez où en sont les choses. Un nouveau pas vient d’être fait, le commandant Esterhazy est déféré au Conseil de guerre. Comme je l’ai dit dès le premier jour, la vérité est en marche, rien ne l’arrêtera plus. Malgré les mauvais vouloirs, chaque pas en avant sera fait, mathématiquement, à son heure. La vérité a en elle une puissance qui emporte tous les obstacles… La Lettre au président de la République répétait, plus violemment, cet appel à la guerre civile des consciences et à l’insurrection des esprits : Elle débutait ainsi :