Page:Lepelletier - Émile Zola, 1908.djvu/452

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les pis chargés, n’ont rien des poétiques héros de romans, ni même de personnages réels, dans notre pays du moins. Ils sont loin d’être sympathiques, comme les a voulus pourtant l’auteur. On éprouve même une sorte de répugnance à voir, à chaque chapitre, cette mère gigogne vêler, ou donner le sein à un nouveau petit. Elle en a quatorze d’affilée. C’est une incontinence génératrice. La mort, qui d’ailleurs sévit normalement dans son étable, lui prend quatre de ces produits ; il lui en reste un stock de dix. Tous ces bambins se suivent en flûte de Pan, donnant l’apparence, quand on les promène, d’une petite classe de pensionnat en sortie. Tous joufflus et robustes. Ils sont laborieux, comme le père de Fécondité. Tous font fortune. Tous sont des étalons vigoureux, se mariant avec des filles qui sont toutes fécondes, capables de peupler une île déserte en quelques années. Ils exercent tous des professions avantageuses et bourgeoises, sauf deux, cultivateurs comme leur père. Pas un n’est soldat. Zola ne s’est d’ailleurs nullement préoccupé de la vraisemblance dans son manuel de puériculture intensive. Il fait de son taureau Mathieu, d’abord dessinateur dans une usine, un paysan par vocation, rude défricheur de bois, de marécages et de landes incultes, acquérant rapidement la fortune terrienne, devenant un grand propriétaire, quelque chose comme le roi du blé, de l’avoine et du seigle dans son département. Tout lui réussit : soit qu’il ensemence la terre, soit qu’il laboure son épouse. Tout crève et se désagrège autour de lui, chez les gens de la ville, banquiers, usiniers, grandes dames, boutiquiers, employés, même la ruine vient au moulin de son voisin, un rural pourtant, parce que tous ces gens-là sont avares de semailles humaines,