Ainsi, j’ai éprouvé la pudeur de votre œuvre, quand l’épaisseur du
crépuscule fatiguait ma maison d’hiver. Mélancoliquement à l’abri,
je me recueillis avec amertume, et quoique mes méditations ne soient
peut-être pas sans vertus, je leur en croirai davantage encore si
l’offrande que je vous en fais, vous assure, Monsieur, de l’admiration
en laquelle vous tient un jeune homme.
SAINT-GEORGES DE BOUHÉLIER.
1er octobre 1896.
La seconde opinion est d’Anatole France, revenu sur d’anciennes
préventions, et effaçant des critiques dont on a beaucoup usé, pour le
mettre en contradiction avec lui-même, et pour accabler la mémoire de
Zola. C’est un extrait du discours juste et élevé, oraison funèbre laïque
et simple, prononcé devant le cercueil de l’illustre écrivain :
Messieurs,
… L’œuvre littéraire de Zola est immense.
Vous venez d’entendre le président de la Société des gens de lettres
la rappeler, dans un langage excellent, à votre admiration. Vous
avez entendu le ministre de l’Instruction publique en développer
éloquemment le sens intellectuel et moral.
Permettez qu’à mon tour je la considère un moment devant vous.
Messieurs, lorsqu’on la voyait s’élever pierre par pierre, cette
œuvre, on en mesurait la grandeur avec surprise. On admirait, on
s’étonnait, on louait, on blâmait. Louanges et blâmes étaient poussés
avec une égale véhémence. On fit parfois au puissant écrivain (je le
sais par moi-même) des reproches sincères, et pourtant injustes. Les
invectives et les apologies s’entremêlaient.
Et l’œuvre allait grandissant toujours.
Aujourd’hui qu’on en découvre dans son entier la forme colossale, on
reconnaît aussi l’esprit dont elle est pleine. C’est un esprit de
bonté.
Zola était bon. Il avait la candeur et la simplicité des
Page:Lepelletier - Émile Zola, 1908.djvu/484
Cette page n’a pas encore été corrigée