Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 3.djvu/207

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Ce langage vertueux et prud’hommesque apparaît plutôt ridicule, dans les circonstances. Il justifiait les railleries de la presse réactionnaire. Avant la circulaire Cluseret, les galons et les bottes des officiers fédérés avaient égayé les promeneurs, devant l’hôtel des Réservoirs, et les propos des tables d’officiers.

Ce ministre de guerre civile ne comprenait pas, n’a jamais pu comprendre, que des insurgés, même enrégimentés et encadrés, ne se conduisaient pas avec les procédés en usage quand il s’agit de troupes professionnelles. La pire aberration, l’irrémédiable sottise aussi, du général américain, furent de vouloir considérer des combattants d’insurrection comme des soldats d’armées permanentes. Cette obstination et cette illusion furent une des causes les plus sérieuses du découragement progressif des défenseurs de la Commune. Mieux valait avoir dans les tranchées et aux batteries des officiers trop galonnés que de constater que les vides n’étaient pas comblés dans les rangs, décimés par le dégoût d’une discipline tatillonne et de rigueurs administratives encore plus que par les obus.

Avec sa « république austère », Cluseret s’exprimait en calviniste, et ne pouvait toucher le cœur de ses guerriers volontaires. Le puritanisme qu’il affectait pour la tenue indisposait ses officiers les meilleurs. Beaucoup d’entre eux avaient sans doute un goût excessif pour la passementerie, mais, outre que c’était là une manie traditionnelle dans toutes nos armées, ces dorures et ces aiguillettes ne les empêchaient pas de bien se battre, au contraire. Le panache dans les armées régulières est un frein et un stimulant. Il entraîne et maintient dans le sentier du péril et du devoir. Henri IV avait connu cet adjuvant que voulait ignorer Cluseret. Au lieu de chercher à ralentir le zèle