Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 3.djvu/409

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

par les versaillais, ni par les fédérés, l’attaque, la défense ne furent bien menées.

La grande faute de Cluseret fut d’avoir conçu, a priori, un système uniquement défensif. Il ne vit pas, ou ne voulut pas comprendre, que du jour où Paris serait investi, enfermé dans ses fortifications, il serait perdu. Rossel partagea cette erreur, mais il subissait la situation déjà faite.

Cluseret était cependant un général de guerre civile. Il avait eu l’expérience de la grande lutte américaine, lors de la Sécession. Mais, aux États-Unis, il combattait pour le Nord, et il était du côté des vainqueurs. Or, ceci pouvait modifier sa façon de voir les choses. Les deux guerres civiles n’avaient de commun que l’épithète. C’étaient en Amérique comme deux nations étrangères aux prises ; les nordistes et les sudistes n’avaient pas le même tempérament : la fin de la lutte fut bien amenée par le siège et la reddition de Charlestown, comme la prise de Paris termina la guerre civile française, mais avant Charlestown, il y avait eu une longue et meurtrière campagne, qui comprit des séries de grandes batailles et de rencontres au large en de vastes plaines, analogues aux diverses péripéties d’une grande guerre européenne. Cluseret ne pouvait faire profiter Paris de son expérience américaine. Et puis il ne croyait pas à la résistance d’une garde nationale contre la troupe exercée. Les combats acharnés et brillants du mois de mai devaient lui donner un démenti, mais alors il était remplacé. Il partageait les préjugés des généraux professionnels contre les « pékins ». Il était de l’école de Trochu, et, malgré l’exemple récent, il retomba dans les fautes qui avaient amené inévitablement la défaite dont ce déplorable guerrier doit porter la responsabilité. Sa culpabilité et son incapacité furent pires peut-être, et en quelque sorte moins admissibles, que celles du pieux général. Trochu ne croyait