Page:Lepelletier - Paul Verlaine, 1907.djvu/398

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lité de l’intervention providentielle dans les affaires des hommes, la même impossibilité d’action, de direction et de changement, dans les affaires physiques. Verlaine était donc, à vingt ans, absolument incroyant, par raisonnement, conviction, études, et non simplement par grossièreté négative, par a priori matérialiste, comme la plupart des hommes qui ne savent pas, qui ne réfléchissent pas. Il avait l’athéisme rationnel et intelligent.

Mais la religiosité, dont nos êtres sont doublement imprégnés, par l’hérédité et par l’éducation première, — nous avons tous chanté des cantiques, à onze ans, et écouté des légendes miraculeuses, — subsistait en lui ; elle sommeillait, la douleur l’a réveillée. C’était cet ancien sédiment pieux, déposé au fond de son âme, comme une poudre qui aurait été mouillée, noyée, puis, avec le temps, et dans d’autres circonstances, qui se serait séchée, enflammée tout à coup, faisant explosion au choc des événements. La souffrance a souvent de ces percussions inattendues.

Il convient d’ajouter une autre cause accidentelle à l’explication de ce réveil du sentiment religieux, chez Verlaine, dans ce qu’il a de plus enfantin : l’appel à Dieu, comme à un médecin supérieur, guérissant les plaies de l’âme, le secours crié à la divinité comme à un gardien, comme à un défenseur contre les dangers et les violences qui vous assaillent ou vous menacent.

Verlaine, outre l’accablement de la prison, l’isolement, l’examen de sa vie passée, car toutes ces conditions de dépression durent influer sur ses sentiments et lui faire invoquer l’appui du Ciel dans sa détresse, reçut en sus un coup brutal, non inattendu certes, ni imprévu, mais amorti par l’espoir optimiste, écarté par l’imagination, repoussé à l’aide d’hypothèses favorables, et sup-