Page:Leprohon - Antoinette de Mirecourt ou Mariage secret et chagrins cachés, 1881.djvu/126

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— C’est cela, ma jolie nièce, répliqua-t-il en souriant. Ce sont là des subtilités de femme fashionable. Ma petite Antoinette, qui avait l’habitude de me servir le déjeuner tous les matins à sept heures et qui y prenait part avec un excellent appétit, ne connaissait pas alors la signification de l’état nerveux.

— Mais, cher oncle, Antoinette n’était qu’une petite fille il y a quelques mois ; maintenant, elle est une jeune demoiselle.

— Une demoiselle à la mode, veux-tu dire, Lucille ; mais ce n’est pas tout : je trouve en elle un changement indéfinissable que je ne puis expliquer ; peut-être est-ce qu’elle est plus gracieuse, plus élégante, en un mot qu’elle ressemble plus à ma charmante nièce madame d’Aulnay, avec cette robe d’une mode nouvelle. Cependant, que cette apparence extérieure de ma fille soit satisfaisante, c’est bien ; mais je ne puis admettre que je sois content d’elle sur d’autres points… Ah tu peux rougir, ajouta-t-il en voyant le visage d’Antoinette se couvrir d’un vif incarnat. J’ai deux sérieuses accusations à porter contre toi. D’abord, pour quelles raisons as-tu rejeté Louis Beauchesne, le mari que je t’avais choisi, auquel je t’ai promise ?

— Parce que, cher papa, je ne l’aime pas suffisamment pour devenir sa femme.

— Ah ! Lucille, Lucille ! c’est là le fruit de ton travail, s’écria M. de Mirecourt en inclinant sa tête vers la jeune femme en signe de reproche. C’est pré-