Page:Leprohon - Antoinette de Mirecourt ou Mariage secret et chagrins cachés, 1881.djvu/222

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Est-ce là ton idée sur l’obéissance des épouses ?

Pas de réponse.

— Parles, continua-t-il après un moment de silence et d’un ton irrité. Est-ce que ce jonc — et il saisit la main où brillait l’anneau nuptial — est-ce que ce jonc et l’union dont il est l’emblème sacré sont une pure moquerie ?

Et dans sa fureur, il pressa vivement, peut-être sans le savoir, la main qu’il tenait dans la sienne, de telle sorte qu’un cercle, moitié livide, moitié rougeâtre, se forma autour du jonc.

— Continuez ! dit-elle sans trahir autrement que par un amer sourire la douleur physique que ce serrement lui avait causé. Pourquoi ce symbole extérieur de notre union malheureuse ne torturerait-il pas mon corps comme la réalité torture mon âme ?

— Tu es très-flatteuse ! reprit-il en laissant tomber et en repoussant la main qu’il avait si fortement pressée, non pas dans une effusion d’amour, mais dans un mouvement de colère. Il me semble que l’union dont tu déplores les chagrins en termes si éloquents, ne te cause pas une très forte impression : elle ne t’a pas appris les devoirs et l’affection que tu dois à celui que tu appelles ton mari, et elle ne t’a pas empêché de recevoir les aveux d’autres amoureux.

— Mais à qui en est la faute, Audley ? répondit-elle tout-à-coup avec une vivacité extraordinaire. Pourquoi m’avez-vous placée, pourquoi me tenez-vous