Page:Leprohon - Antoinette de Mirecourt ou Mariage secret et chagrins cachés, 1881.djvu/82

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Cette action avait si bien pris Antoinette par surprise, que le papier était en cendres avant qu’elle n’eût pu deviner l’intention de sa cousine ; mais revenant bientôt de cet étonnement mêlé d'indignation, elle s’écria, les joues animées :

— Pourquoi avez-vous fait cela, madame d’Aulnay ?

— Simplement parceque je ne veux pas voir ma chère petite cousine devenir malheureuse à force de méditer les lettres prosaïques d’une vieille femme à l’esprit étroit et sévère. Pourquoi ? parce que cette absurde épître t’a donné un affreux mal de tête hier, grâce aux larmes qu’elle t’a fait répandre ; parce que, enfin, je ne voudrais pas voir la chose se répéter aujourd’hui surtout que tu es dans un état nerveux et épuisé.

— Tu as très mal fait, répliqua la jeune fille… Je n’en dis pas plus, car je sais que tes intentions étaient bonnes.

— Je t’offre mille remerciements, petite, pour le prompt pardon que tu veux bien m’accorder ; en retour, je vais te faire part d’un secret que je viens de découvrir… Quoi ! tu ne t’empresses pas de demander ce que c’est ? Eh ! bien, je vais te le dire sans cela : c’est que tu as fait la pleine te entière conquête du plus bel homme de notre cercle de connaissance : Audley Sternfield est profondément amoureux de toi.

À ces mots, une vive rougeur couvrit le visage d’Antoinette, Madame d’Aulnay reprit avec une charmante espièglerie :

— Et, pour te rendre compte de toutes mes décou-