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Craignant de perdre possession de lui-même et sachant qu’une intervention de sa part dans la présente affaire serait très préjudiciable à mademoiselle Audet elle-même, il tourna brusquement dans une épaisse allée de sapins ; arrivé au milieu, il se jeta tout de son long sur la pelouse, et prenant son mouchoir, il s’en essuya le front. Il paraissait vivement agité ; mais Paul Durand ne se laissait jamais aller au soliloque, de sorte qu’après une demi-heure de réflexion profonde, il se leva et revint lentement à l’endroit où il avait laissé Geneviève.

Elle y était encore, les yeux attentivement fixés vers la terre, et un air plus fatigué, plus languissant encore que d’habitude répandu sur ses petits traits réguliers. Les voix perçantes des enfants engagés dans un jeu turbulent retentissaient tout près de là ; mais elle ne paraissait pas les entendre, non plus que Durand, car il l’aborda doucement. Il fut obligé de répéter sa salutation d’une voix un peu plus haute ; cette fois, elle leva la tête.

— Je présume, dit-il alors, que je ne dois pas demander à mademoiselle Audet ce à quoi elle songeait ? ses pensées paraissaient être bien loin d’ici ?

— Oui, elles étaient en France.

— Oh ! sans doute, c’est parce que mademoiselle Geneviève y a beaucoup d’amis qu’elle aime tendrement ?

— Non, répondit-elle avec douceur, je n’en ai plus maintenant.