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LE MANOIR DE VILLERAI

désagréable, s’écria le capitaine de Cournoyer. Justement à la veille d’aller rejoindre nos amis de Québec ; et ce qui est pis, deux officiers du même régiment. N’y aurait-il pas moyen, voyons, de Montarville, de régler cette affaire à l’amiable ?

— Il n’y en a aucun ; à moins que de Noraye ne se rétracte ouvertement et ne me fasse excuse pour les faussetés qu’il a émises aujourd’hui contre une personne dont le tort à ses yeux a été de repousser dédaigneusement les insultantes attentions qu’il voulait lui porter.

— Cela, il ne le fera jamais, dit avec emphase l’enseigne Delaunais. De Noraye est aussi brave que vain et léger. D’ailleurs, il est trop bon tireur. Qui a jamais vu un tireur comme lui faire des excuses ?

— C’est malheureux, s’écria de Cournoyer en posant pesamment sa main sur l’épaule de de Montarville, c’est vraiment malheureux que cette noble vie qui a été si près de périr à Carillon, soit encore risquée pour une aussi misérable querelle. Et vous, aussi, qui pendant si longtemps avez été condamné à une fatigante inaction !

— Que dira votre fiancée, Gustave, quand elle apprendra cette affaire ? demanda un autre. Votre nom et celui d’un individu si bien connu que de Noraye, mêlés ensemble à propos d’une jolie fille ! Le récit devra être rien moins que flatteur à ses oreilles.

De Montarville rougit légèrement, mais il reprit avec calme :

— Mademoiselle de Villerai est trop noble pour être piquée ou irritée de cette affaire. Elle est aussi bonne que belle.

— Bien, dit un autre en bâillant, si cette charmante enfant pour laquelle vous allez vous battre, était aussi une seigneuresse et une héritière, je la préférais même à la majestueuse Blanche. Mais, allons, venez faire un tour en bas de la rue, je commence à être fatigué de ce coin.


XX


Un jour, madame de Rochon était à coudre dans sa chambre, et Rose se tenait près d’elle, occupée à tailler des vêtements grossiers mais confortables, destinés aux pauvres