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SOUS BOIS

un autre livre ouvert à ses côtés, témoignaient de ses occupations précédentes.

Des petits paniers contenant encore des restes de gâteaux et de fruits, des écorces d’oranges et des noyaux épars autour du lieu de campement, prouvaient surabondamment qu’on y avait fait bonne chère. Enfin, des poupées, adossées au tronc d’un arbre voisin, montraient que les habitantes de ce petit coin perdu dans les sapins n’étaient pas encore bien âgées, malgré les grands airs qu’elles prenaient parfois. Même, Marie-Antoinette possédait une magnifique poupée articulée aussi grande qu’un bébé de quatre ans, dont elle s’occupait peu pour son propre compte, mais dont elle faisait grand étalage, et qu’elle prêtait volontiers afin qu’on n’oubliât point qu’elle en était l’heureuse propriétaire. Les toilettes luxueuses de cette jeune personne étaient une source de ravissements et d’extases perpétuelles pour Élisabeth et Charlotte qui ne dédaignaient pas, comme Geneviève, le jeu de la poupée. Valentine ne s’en souciait guère, mais elle avait, par moments, des tendresses subites pour une certaine « fille » qui lui avait été donnée deux ans auparavant, et qu’elle préférait de beaucoup aux nombreuses poupées de toutes tailles et de tous costumes, qu’un oncle prévoyant avait chargé Mlle Favières d’acheter à Paris pour ses nièces.

« Je vous admire, de bailler ainsi, reprit Geneviève en dépouillant nerveusement, brin à brin, un grand panache de feuilles qui lui servait tour à tour d’éventail ou de fouet pour exciter l’ardeur d’un coursier imaginaire. « Faites quelque chose, si vous vous ennuyez, remuez-vous, amusez-vous, mais ne restez pas là comme des momies. »

— Grand merci, lui répondit Élisabeth, il fait trop chaud pour prendre de l’exercice comme tu en prends.