Page:Lermontov - Un héros de notre temps, Stock, 1904.djvu/259

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parfaitement tiré et j’ai pu jeter un regard curieux dans l’intérieur de la chambre.

Marie était assise sur son lit, les mains croisées sur ses genoux. Ses longs cheveux étaient ramassés sous un joli bonnet orné de dentelles. Un grand foulard ponceau couvrait ses blanches épaules et ses petits pieds se cachaient dans des pantoufles persanes toutes bigarrées. Elle était assise et immobile, la tête penchée sur sa poitrine. Devant elle, sur une table, un livre était ouvert, mais ses yeux fixes et pleins d’une tristesse inexprimable semblaient parcourir pour la centième fois la même page, tant sa pensée était loin de là.

À ce moment, quelque chose a remué derrière un buisson. J’ai sauté du balcon sur le gazon ; une main invisible s’est abattue sur mon épaule.

« Ah ! a dit une voix brutale, je le tiens !… Tu iras chez ma princesse la nuit !

— Serre-le plus fort ! a crié une autre voix qui partait d’un coin. »

C’était Groutchnitski et le capitaine de dragons. J’ai envoyé un coup de poing sur la tête de ce dernier, d’un croc en jambe j’ai étendu l’autre à terre et me suis élancé au milieu des massifs.