Page:Lermontov - Un héros de notre temps, Stock, 1904.djvu/273

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Il était en pantalon gris, en arkalouk[1] avec un chapeau circassien. J’éclatai de rire en voyant cette petite figure sous cet énorme chapeau de fourrures, son visage n’avait pas le moins du monde l’air belliqueux, et en ce moment il me parut encore plus petit qu’à l’ordinaire.

« Pourquoi êtes-vous si triste, docteur ! Est-ce qu’il ne vous est pas déjà arrivé cent fois d’accompagner des hommes hors de ce monde avec la plus parfaite indifférence ? Imaginez-vous que j’ai la fièvre jaune et que je puis mourir, comme je puis revenir à la santé, l’un et l’autre sont dans l’ordre des choses. Efforcez-vous de me considérer comme un homme atteint d’une maladie que vous ne connaissez pas bien encore, et cela excitera votre curiosité au plus haut degré. Vous pouvez dès maintenant faire sur moi d’intéressantes observations physiologiques. L’attente d’une mort violente n’est-elle pas elle-même une maladie réelle ?

Cette idée frappa le docteur et il devint plus gai.

Nous montâmes à cheval. Verner se cramponna aux rênes de ses deux mains et nous par-

  1. Pardessus circassien.