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BALAOO

— Oui, acquiesce-t-il. C’est vrai ! Dieu les faisait plus beaux !

Il lance ça devant Madeleine. Balaoo en est d’abord suffoqué. L’étonnement le paralyse, l’abrutit. Coriolis, qui voit la peine que le visiteur a fait à son élève, à l’enfant de sa création, veut prononcer des paroles consolatrices :

— Dieu en a fait de plus beaux, mais il n’en a pas fait de plus doux, de meilleur, de plus aimant, de plus dévoué. Celui-ci a bien récompensé son vieux maître de tout le mal qu’il lui a d’abord donné, car, il faut bien avouer que ça a été dur de lui faire oublier pendant les premières années les jeux de la forêt de Bandang ; mais maintenant c’est tout à fait, j’ose le prétendre et suis enfin prêt à le prouver, un de la race humaine.

À ce discours qui aurait dû le toucher, M. Herment de Meyrentin sourit comme un sot, et, montrant du doigt le paletot et le pantalon en pièces (Balaoo pleurerait, mais il retient ses larmes devant un étranger), il dit :

— Hum ! Hum ! Il se permet encore quelques petites frasques !…

Mais le bon Coriolis répond à l’imbécile solennel :

— J’ai connu des enfants des hommes, qui n’avaient pas plus de dix-sept ans, dont les parents eussent été heureux qu’ils passassent leur temps à arracher leurs fonds de culottes en montant aux arbres pour y chiper des pommes. Ce n’est pas à moi de vous conseiller de consulter les annales des assises, mon cher Maître ; vous n’ignorez certainement pas à quoi passent leur temps les petits d’hommes de dix-sept ans, un couteau à la main ! (Baloao pense : « le Maître a raison, je n’ai jamais