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BALAOO

On ne l’entend pas marcher. Il a appris à marcher en silence, même avec ses souliers vernis. Et puis, le long de sa route, aucune bête à plume qui dort sur sa patte, ne serait assez maladroite, étant réveillée en sursaut, pour crier à l’assassin. Elle sait tout de suite que c’est l’ami Balaoo qui passe.

Aucun animal ne donnera l’éveil ; il peut être tranquille, il peut être tranquille pourvu que les chiens sentent la fouine.

Les chèvres d’Abyssinie, dans leurs huttes, ont un petit bonsoir de bêlement complice qu’il est le seul à comprendre et auquel il répond sans s’arrêter par un simple soufflement des narines. Les grands échassiers, les grands hérons lui jouent, en sourdine, avec leur long bec, un petit air de claquoir.

Mais il n’entrera pas chez l’horrible tribu singe de basse classe, autrement dit : singe à queue prenante. Ça, c’est le rebut et la honte de l’animalité universelle.

Chaque race a ses hontes… Il y a chez ceux de la race d’hommes de honteux troglodytes qui vivent enfermés dans des trous de pierre, toujours assis sur leur derrière, avec des cheveux jusqu’aux talons ; comme il y a d’étonnants Esquimaux à cuisses de peau de phoque, comme il y a des nègres, des nègres qui osent mettre des faux-cols blancs. Si Balaoo était quelque chose parmi ceux de la Race, si jamais, un jour, il se réveillait avec des pieds de souliers convenables, il ferait des conférences dans le monde entier pour que les nègres n’aient le droit que de mettre des faux-cols noirs.

Mais les singes de basse classe à queue prenante, c’est la honte des hontes de tout !

Un anthropopithèque peut fréquenter toute la création,