Page:Leroux - Balaoo, 1912.djvu/348

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
328
BALAOO

« Dans cet hôtel (dans lequel nous avons pénétré par une fenêtre), toutes choses se trouvent dans le plus grand désordre. L’immeuble paraissait avoir été abandonné avec précipitation.

« Nous fûmes reçus cependant par un perroquet qui ne cessa pendant plus d’une heure de nous crier avec fureur un mot ou plutôt un nom auquel nous ne comprîmes rien tout d’abord, mais qui restera, lui aussi, célèbre dans l’histoire des races ! Balaoo ! Balaoo ! Balaoo !… Balaoo, c’est le nom de bête du monstre qui, dans la vie parisienne, a son nom d’homme : M. Noël ! Balaoo ! c’est le nom du premier singe qui aura parlé la langue des hommes !

« Ah ! dans son quartier, on connaît M. Noël ! Ses allures bizarres, sa singulière laideur, son dandinement caractéristique, n’avaient pu passer inaperçus, et les grimaces qu’il fait autour de son monocle ont plus d’une fois excité les rires et les plaisanteries des petits vauriens de la rue. Mais qui donc aurait pu jamais se douter que ce personnage un peu excentrique, mais jusqu’alors correct, était l’anthropopithèque de Java, car M. Noël est un habitué du Vachette et de la Brasserie Amédée. M. Noël va à la Faculté de droit ! M. Noël fait partie, au Palais de Justice, de la conférence Bottier ! M. Noël s’habille comme un honnête homme ! M. Noël parle français comme vous et moi. Et cependant, ô prodigieux mystère des races, M. Noël n’est pas un homme ! M. Noël n’est qu’un anthropoïde ! Il a quatre mains ! Il s’apparente directement au grand chimpanzé oriental des forêts de Java dont on a pu voir le type au Jardin des Plantes dans le singe Gabriel.

« Et maintenant, quel est ce mystère qui va bouleverser le monde ? Comment sommes-nous arrivés à pénétrer un pareil secret. Comment avons-nous pu rejoindre le