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BALAOO

L’attention populaire s’était attachée dès l’abord à ce nouveau personnage.

C’était un géant.

Il dépassait la foule d’une bonne tête. Bientôt son nom courut la foule, car cet homme était célèbre. C’était le fameux Barthuiset, le tueur de lions.

S’il fallait en croire la légende et ce qui se racontait autour des tables de café, sur le boulevard, à l’heure de l’apéritif, cet homme avait, en Afrique, tué plus de lions qu’il n’y en eut jamais dans l’Atlas.

C’était sur lui que M. Mathieu de la Fosse comptait pour tuer Balaoo.

Depuis le matin, Balaoo ne donnait plus signe de vie, mais on se méfiait et personne n’avait encore osé s’approcher des échafaudages.

Quand il fut à dix mètres de la tour, M. Mathieu de la Fosse dit à Coriolis qui paraissait hébété et tout à fait hagard :

— Vous allez l’appeler.

— Pourquoi faire ? demanda l’autre, de plus en plus stupide.

— Pour parlementer !… Comprenez que nous ne tuerons votre anthropopithèque qu’à la dernière extrémité… expliqua le Préfet. Il nous en a déjà fait voir de toutes les couleurs. Puisque vous prétendez qu’il entend raison, parlez-lui… amadouez-le, dites-lui quelque chose, prouvez-nous enfin que ce n’est pas tout à fait un sauvage ?

Coriolis, à ces mots, se laissa prendre.

Car le terrible était (et le Préfet l’avait deviné) qu’en dépit des crimes de Balaoo et de l’enlèvement de Madeleine, Coriolis, instinctivement, voulait sauver Balaoo…