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L’HOMME QUI REVIENT DE LOIN

Fanny… Il faut décider cet homme à faire soigner cette enfant !… »

Et, entraînant le Dr Moutier qui restait tout à fait perplexe devant un cas aussi caractérisé de « suggestion par l’Au-delà », elle lui disait :

« Il doit y avoir des maisons pour soigner ces maladies-là !… »

Quant à Jacques, qui n’avait pas quitté Marthe, il était presque aussi pâle, aussi défait qu’elle…

Il la regardait sans prononcer un mot…

Et il commençait réellement à avoir une peur affreuse de cette femme qui voyait si souvent son frère…

Soudain, elle se mit à parler tout haut, comme à elle-même… comme s’il n’avait pas été là…

« Moi, je sais bien que c’est toi, mon André !… disait-elle. Quand tu dois venir, tu m’en avertis de si loin !… Je sens que tu es à l’autre bout du monde… à des milliards de lieues peut-être, mais « la pensée » accourt ! la pensée qui te précède et qui vient frapper à mon seuil… et qui me dit : « ouvre ta porte… je t’annonce qu’il va venir !… » et je fais ce que me dit « la pensée » et je ne pourrais pas rester tranquillement chez moi quand la pensée a parlé, la pensée qui accourt devant toi, mon André !… Je me lève, et je la suis, et je ne sens pas le froid du monde, car mon cœur brûle et m’étouffe à l’idée que tu accours de si loin, de si loin, pour me voir, pour me parler…