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Page:Leroux - L’Homme qui revient de loin.djvu/210

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L’HOMME QUI REVIENT DE LOIN

Mais en avons-nous réellement besoin ? Je dirai non !… non, avec le Dr Tuffier et avec tous ceux qui pensent qu’un homme dont le cœur ne bat plus, dont le sang depuis un quart d’heure ne circule plus, est mort !… La décomposition, la rigidité cadavérique, sont en elles-mêmes, moins des preuves que des conséquences de la mort qui les a précédées. Mesdames, messieurs, le stéthoscope en main, nous avons constaté la mort de cet homme et voilà celui qui l’a fait revivre ! »

Disant ces mots, le professeur Jaloux, avec un de ces gestes plein d’autorité et de grâce dont il avait le secret, désigna à sa droite, le brave Dr Moutier qui, écarlate et modeste, baissait les yeux.

Aussitôt, les Jalouses, comme si elles n’avaient attendu que ce signal, « faisaient un triomphe » au rédacteur en chef de la Médecine astrale, criaient : « Bravo ! bravo ! » à tue-tête, agitaient leurs aigrettes, secouaient leurs panaches et tapaient l’une contre l’autre leurs petites mains gantées et frénétiques.

« Mesdames, messieurs, continuait Jaloux en remuant, le petit doigt en l’air, sa cuiller dans le verre d’eau sucrée, un sentiment d’humanité dont nous n’avons pu nous départir, ne nous a peut-être point permis de tirer d’un tel événement tout l’enseignement expérimental qu’il comporte. Cet homme était allé chez les morts ; qu’y avait-il vu ? Pour le savoir, il nous fallait l’interroger. Mais l’état manifeste d’épouvante dans lequel il se trouvait au retour d’un pareil voyage, et la faiblesse d’un organe