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L’HOMME QUI REVIENT DE LOIN

À ces mots, un grand frisson parcourut toute la salle ; de petits cris d’effroi satisfait s’échappèrent de petites bouches. Une aussi importante nouvelle faisait se pâmer toutes ces dames. Tour à tour, elles se sentaient elles-mêmes mourir et renaître aux accents suaves et tout de même effrayants du divin Jaloux ! Avec lui, avec lui seul, elles eussent voulu visiter le ciel mais avec lui seul aussi elles consentaient à descendre en enfer. Suspendues à son verbe élégant et sacré, elles se promenaient dans le royaume des morts, en attendant l’heure des morts.

« Oui, mesdames, continuait Jaloux (il ne disait même plus « et messieurs » tant les messieurs qui sont toujours un peu frondeurs et se plaisent à faire les « esprits forts » l’intéressaient peu en un pareil jour de triomphe), oui, mesdames, les premières paroles de l’opéré ont été pour nous tracer une fresque tragique de la vallée qu’il habite et telle qu’elle lui est apparue dans la mort, avec ses vivants et avec ses morts ! Ceux-ci entourant ceux-là de leurs tourbillons invisibles, âmes impures condamnées à faire leur purgatoire parmi toutes ces choses qu’elles ont tant aimées et qui ne se souviennent même plus d’elles, esprits alourdis par les liens matériels d’une existence précédente entièrement consacrée à la chair, et incapables, par conséquent, de s’élever jusqu’aux sphères sublimes qui se balancent sous les pieds de la Beauté ! c’est-à-dire de la Divinité !… »

… Jaloux, d’un coup d’œil, avait mesuré