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LA DOUBLE VIE DE THÉOPHRASTE LONGUET

Emmanuel, Noun, Samech, Haïn… Sabaoth… Adonaï…

Encore des noms sur les murs de pierre.

Le seul ornement de ces murs, sur lesquels couraient des noms, était, à hauteur d’homme, une théorie sans fin d’étoiles formées par les deux triangles du sceau de Salomon. Entre chaque étoile ou sceau, on lisait ce mot peint en vert : NIRVANA.

Ce corridor ne fuyait pas en ligne droite. Il avait des courbes et des angles. Bientôt même, il eut un carrefour. Théophraste s’arrêta prudemment. Mais il s’impatienta encore et s’enfonça dans l’un des deux corridors qui aboutissaient au premier corridor. Cinq minutes après, sans qu’il pût y rien comprendre, il se retrouvait au même carrefour. Alors, il remonta le premier corridor, refaisant le chemin qu’il avait suivi en sortant du vestibule ; mais, fait véritablement surprenant, il ne retrouva pas le vestibule. Il se disposait à hurler de détresse, quand il vit Adolphe devant lui. Celui-ci avait ses yeux rouges comme des yeux qui ont pleuré. M. Lecamus lui dit avec une grande tristesse :

— Viens ! Marceline est là. Nous allons te présenter à un bon ami.

Et Théophraste se trouva, sans savoir comment, dans une vaste pièce sombre, où son regard fut attiré par une lueur merveilleuse qui tombait sur la plus noble, la plus douce et plus belle figure d’homme qu’il eût jamais vue. Chose étrange, cette figure ne semblait pas recevoir de la lumière ; elle paraissait en dégager. De fait, quand cette figure remuait, elle entraînait la lumière avec elle. Elle était figure et flambeau. Devant ce flambeau, une femme, dans la plus humble des attitudes et les mains jointes, se tenait, recueillant sur elle quelques reflets de cet être harmonieux et divin.