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Page:Leroux - La Machine à assassiner.djvu/129

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LA MACHINE À ASSASSINER
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seulement en nous des savants, mais encore des hommes susceptibles d’émotion en face du malheur public !

Puis soudain, tous se turent, un peu honteux d’avoir interrompu leur maître, lequel ne disait plus rien. Ce fut au tour du reporter :

— Mon cher maître, je vous en prie, Paris, la France, le monde vous écoutent !

— Monsieur le journaliste, ce que j’ai à dire est si grave, si exceptionnel, et déterminera contre nous une telle levée de boucliers ou, si vous le préférez, de lancettes, qu’il faut pardonner à mes chers confrères un peu… d’agitation. Et maintenant, revenons à Jacques Cotentin, qui est l’un des plus hauts esprits que je connaisse. Au point de vue scientifique, c’est l’idée de conservation universelle qui l’a toujours dirigé, autrement dit c’est l’espoir tenace de trouver le mouvement perpétuel, non certes sous la forme naïve de création d’énergie de toutes pièces, mais, comme l’a énoncé Bernard Bruhnes (sans y croire) sous la forme plus raffinée de restauration d’énergie utile, qui a inspiré ses premiers travaux de laboratoire. Dans le moment où il allait trouver en défaut le principe de la dégradation de l’énergie, il fut frappé de certains résultats obtenus outre-Atlantique par un mode de traiter les tissus qui semblait devoir les conserver quasi indéfiniment.

« C’est alors que lui vint l’idée, puisqu’il n’avait pu vaincre la mort dans le général, d’essayer d’en triompher dans le particulier ! Il n’avait pu encore créer la vie, il essayerait, avec des tissus arrachés à la mort, de créer un être vivant !… un homme !… et même un surhomme !…

« Ce rêve où se réfugiait maintenant toute l’ardeur de son génie, peut-être ne l’eût-il point conçu, s’il n’avait eu, à ses côtés, ce vieil horloger qui, lui aussi, poursuivait la même idée, dans le domaine mécanique… Dans ce temps, le bonhomme Norbert était arrivé à fabriquer, aidé de sa fille, un automate qui était déjà