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Page:Leroux - La Machine à assassiner.djvu/237

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LA MACHINE À ASSASSINER
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— Allez ! il en a vu lors de la première nuit !

Il finit par dire :

— Adolphine ! fiche-moi la paix !

Adolphine, elle, prenait sa revanche. Elle n’avait pas oublié comment elle avait été chassée par l’empouse, au regard de tout le village, au moment des obsèques… Ah ! elle ne ménageait pas le marquis et elle incitait Bridaille, Verdeil et Achard à répéter leur histoire aux nouveaux arrivants.

Les bols de vin chaud, le punch chauffaient les cœurs et les cervelles. Bridaille, le forgeron, tapait sur la table comme sur une enclume :

— Nous, ne sommes pas des enfants ! Verdeil, qu’est toute la journée avec ses mécaniques, n’est pas un type à se frapper d’une chose qui n’existerait pas !… Il ne s’agit plus là de l’enchanteur Orfon et des contes de vieilles, une soirée de Noël… La main dans ma forge, je dirais : « Elle nous a parlé !… Elle nous a demandé le chemin de son tombeau ! »

Comme il prononçait ces mots, la porte de la salle commune fut poussée et un homme se présenta dont la seule apparition commanda instantanément le silence.

M. Lebouc, dans son coin, eut la sensation qu’il se trouvait en présence du marquis. Il ne se trompait pas.

Il n’avait pas l’air content, le marquis ; dans sa figure de brique, ses yeux brûlaient d’une flamme mauvaise. Jamais il n’avait paru plus près de l’apoplexie. Sa main droite maniait un fouet à chien dont la grosse lanière cinglait fébrilement ses leggins.

— Bonsoir, vous autres ! grogna-t-il en s’asseyant près de la cheminée. Je suis venu, en passant, écouter les idioties de Bridaille ! Paraît que je tombe bien !…

— Sûr ! fit Bridaille sans se démonter. Mais je ne suis pas le seul idiot ici… demandez à Achard, à Verdeil,