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Page:Leroux - La Machine à assassiner.djvu/247

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LA MACHINE À ASSASSINER
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conduisait dans un coin désert de la Sologne où Drouine avait une petite propriété.

C’est là qu’elle était restée depuis. Le docteur Moricet allait la voir toutes les semaines. Tantôt il nourrissait quelque espoir. Tantôt il désespérait d’arriver à un résultat. On s’y était pris trop tard, L’idée de l’« empouse » devait finir par triompher. Elle s’échappait encore la nuit pour aller retrouver son tombeau ! Une fois même elle avait fait des lieues dans un pays impossible pour atteindre Coulteray ! C’était cette nuit-là qu’elle avait parlé aux gens de l’auberge. Drouine avait eu toutes les peines du monde à la rejoindre et à la ramener. C’était lui le fantôme qu’on avait vu poursuivre l’empouse ! Elle était définitivement folle !

— Vous comprenez maintenant, acheva Jacques Cotentin, comment j’eus l’idée de me servir de ce spectre vivant, pour obtenir les aveux du marquis.

— Oui, oui ! fit M. Lebouc. C’était parfaitement imaginé. Seulement, voyez-vous, monsieur Cotentin, dans la vie il faut avoir de la chance. Et, malheureusement, nous n’avons pas de chance ! Voulez-vous que je vous donne un bon conseil maintenant, monsieur le prosecteur ? Eh bien, faites comme moi : faites-vous oublier ! Adieu, monsieur Cotentin !

— Adieu, monsieur Lebouc !…

« Le meilleur moyen de se faire oublier, se disait le malheureux Jacques en rentrant le soir même à Paris, c’est de disparaître pour toujours… je sens que si je ne retrouve pas Christine, je n’en ai plus pour longtemps !… Rien ne m’intéresse plus ici-bas !… »

Il ne pensait plus à sa poupée que pour la maudire…

En pénétrant dans la boutique de la rue du Saint-Sacrement, Jacques fut tout de suite frappé par le désordre qu’il y trouva. C’étaient, dans les coins, un amoncellement de rouages, de ressorts, de roues dentelées, tout cela tordu, massacré, bon désormais pour la ferraille.