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Page:Leroux - La Poupée sanglante, 1924.djvu/176

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LA POUPÉE SANGLANTE

qu’il n’a jamais aimé que moi ! Ah ! comme il m’aime ! comme il m’aime ! Comme il m’offre son bras pour y sentir ma faiblesse. Son amour m’a tout pris !…

» C’est le grand vampire !… Le monde est plein de petits vampires. Il n’y a guère de couples ici-bas qui ne se dévorent. Il faut que l’un mange l’autre ! que l’un profite au détriment de l’autre ! Tantôt c’est le mâle, tantôt c’est la femelle… Un égoïsme plus fort réduit peu à peu l’être qui vit dans son ombre à zéro !… Il n’est point nécessaire pour cela que l’on se perce les veines et que l’on se suce le sang… c’est l’histoire de presque tous les ménages, mais celle du nôtre, c’est autre chose !…

» C’est l’histoire du grand vampire qui est sorti de sa tombe, il y a plus de deux cents ans et qui ne compte plus ses victimes… je n’ai rien inventé, je ne vous le répéterai jamais assez ! ce n’est pas une histoire, c’est de l’histoire ! Et Drouine ne l’ignorait pas. Drouine croit, lui, comme beaucoup d’autres, du reste, au village, qui fuient quand passe le grand vampire…

» Nous nous sommes confessés devant le tombeau vide et je lui ai tout dit !…

» Mais il ne peut rien pour moi, rien avant ma mort ! Mais vous, Christine, vous Bénédict Masson, vous pouvez me sauver avant ma mort !… je vous attends !… »

Cinquième lettre. — « Cette nuit, il m’a accompagnée jusqu’à ma porte comme un amant soumis… et il s’est retiré très triste… Alors, j’ai vivement fermé la porte… j’ai poussé le verrou, j’ai couru à la fenêtre, et j’ai fermé la fenêtre… Car, tant que la fenêtre est ouverte, il peut me mordre à distance !…