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Page:Leroux - La Poupée sanglante, 1924.djvu/252

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LA POUPÉE SANGLANTE

Achard ne tenait plus en place… Très agacé, il fit taire les femmes, qui recommençaient indéfiniment leur Ave Maria.

— Non !… ça n’est pas possible ! Ce qu’on va nous « fabuler » demain (se moquer de nous)…

Et il sortit de la salle.

On lui cria de se tenir tranquille… mais c’était plus fort que lui… Il rouvrit une fenêtre et aussitôt il appela les autres, qui se levèrent sans entrain…

Les femmes ne bougèrent pas… mais elles entendirent :

— La r’v’là… c’est elle !… Elle remonte !… Elle rentre au château !… Tenez !… la v’là près du « meur » !… Elle retourne au cimetière… Eh bien ! qu’elle y rentre et qu’elle n’en sorte plus !… Les empouses, paraît que ça ne travaille que la nuit !… Ça a peur du jour !… Eh bien, alors, et le marquis ?

Les femmes reprirent : Ave Maria !… Ave Maria !… avec une sorte de fureur sacrée… Mais les hommes les firent encore taire dès qu’ils rentrèrent dans la salle : ils étaient déjà familiarisés avec l’idée de l’empouse… Ils l’avaient vue rentrer chez elle… Ils étaient plus rassurés… Ils avaient toute une journée devant eux pour décider de ce qu’il y avait à faire…

Ce qui les tracassait par-dessus tout, c’était la pensée qu’on ne les croirait pas… qu’on les « fabulerait ».

Crainte chimérique, car, aux premiers rayons du jour, quand on osa se montrer dans les rues, tout Coulteray fut debout !

Les gens de l’auberge n’avaient pas été les seuls à apercevoir l’ « empouse »… Il y en avait même qui l’avaient entendue… Par exemple, les deux voisines de la veuve Gérard, qui habitaient près