Aller au contenu

Page:Leroux - La Poupée sanglante, 1924.djvu/35

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
32
LA POUPÉE SANGLANTE

IV

LA ROUGE GOUTTE DE SANG PÈSE PLUS QUE LA MER EN COLÈRE

— Oui, môssieu Bénédique, oui, c’est comme je vous le dis, il se passe là des choses qu’est pas naturelles ; quand je vous ai aperçu ce matin traversant leur salle à manger, j’ai voulu me jeter sur vous pour que vous ne passiez pas, tant je craignais un malheur ! J’ai cru un jour qu’ils allaient me dévorer parce que je m’étais rendue dans le jardin sans leur permission ! Pire que des sauvages, je vous dis ! Pire que des sauvages !

» Ils ne veulent personne, personne autour d’eux ! J’suis même étonnée qu’ils fassent venir une femme de ménage, mais il y a des choses que la demoiselle peut pas faire ; elle ne peut pas laver la vaisselle, par exemple ! ça la répugne, c’te poupée aux mains de grande madame qui n’a pas le sou ! car ça n’a pas le sou ! et c’est fier comme si ça n’avait pas tout vendu, pièce par pièce ! J’ai vu filer l’argenterie, moi ! des morceaux qui ne dataient pas d’hier, pour sûr ! des souvenirs de famille, et des tableaux, et des meubles ! Depuis trois ans, ça se vide là dedans, et comment, et pourquoi ?