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Page:Leroux - Le Château noir, 1933, Partie 1.djvu/137

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LES OUBLIETTES DU CHÂTEAU NOIR

Il avait fait reculer La Candeur et Athanase qui se pressaient autour de lui.

Priski s’était laissé glisser le long de la muraille et regardait Rouletabille sans dire un mot, fixant sur lui des yeux sans vie. Appuyé contre la paroi du souterrain, Rouletabille respirait bruyamment comme si l’air lui manquait. Ses prunelles semblaient s’égarer dans leur orbe.

« Qu’est-ce qu’il y a ? Qu’est-ce qu’il y a ? » demandaient La Candeur et Athanase.

La figure de Rouletabille était si défaite, si lamentable à voir à la lueur de la lanterne d’Athanase, que La Candeur en était prêt à sangloter.

« T’as pas mal, dis ?… T’as pas mal ?…

— Non ! répondit le reporter… Non !… c’est passé !… c’est passé !… Non… je n’ai pas mal…

— Mais qu’est-ce que tu as eu ?

— Eh bien ! il y a eu que j’ai eu peur !… »

Et, se tournant vers Priski :

« Vous avez raison, Priski… c’est épouvantable… »

Athanase n’y tint plus et s’en vint à son tour au bord de l’oubliette et, lui aussi, leva sa lanterne… et lui aussi eut un mouvement de recul, une sourde exclamation… lui aussi revint vers les autres avec un visage de mort.

« Oh ! fit-il… oh !

— Va voir, La Candeur, va voir !… Il faut que nous revoyions cela… il faut que nous nous habituions à cela… Puisque c’est par là que nous devons passer… Et puis, maintenant tu es averti… tu sais que c’est horrible… Va !… »

Mais La Candeur secouait la tête. Il ne voulait pas y aller.

« Mais puisqu’il faut passer par là !

— Eh bien ! on y passera, mais je fermerai les yeux.

— Il faut se faire une raison, dit Rouletabille. Après tout, c’est des morts.

— Vous avez vu souvent des morts comme ça ? demanda Athanase d’une voix blanche.