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Page:Leroux - Le Roi Mystère.djvu/248

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Teramo-Girgenti resta quelques secondes sans répondre à Sinnamari, et puis il dit d’une voix qui retint l’attention déjà si éveillée de tous ceux qui l’entouraient :

— Vous avez tort de rire, monsieur le procureur impérial, et pour que vous ne riiez plus, je m’engage devant vous…

— À ressusciter les morts ? s’écria Sinnamari.

— Un seul ! Un seul cadavre revivant, monsieur le procureur, et ce sera suffisant, je crois, pour que vous ne riiez plus !… répliqua le comte d’une voix tellement lugubre qu’un silence pesant succéda tout à coup à toutes les conversations. Ceux qui n’avaient pas entendu et qui n’étaient pas au courant demandaient à leurs voisins : « Qu’est-ce qu’il y a ? Qu’est-ce qu’il y a ? » et les autres répondaient tout bas : « C’est le comte qui s’engage, devant le procureur impérial, à ressusciter les morts ! »

— Vous avez donc bien envie de me convaincre personnellement de votre pouvoir surnaturel ? demanda Sinnamari, qui ne voyait pas bien où son dangereux hôte voulait en venir.

— Nullement, mon cher procureur, nullement ! Je vais vous faire profiter d’une occasion, simplement… Vous, et ceux de ces messieurs et de ces dames qu’un pareil événement pourrait intéresser…

Immédiatement, tout le monde se proposa pour être de cette exceptionnelle partie d’outre-tombe ; mais le comte, de plus en plus calme et de plus en plus lugubre, déclara qu’il ne pouvait pas dire s’il y aurait place pour tout le monde, attendu qu’il ne savait pas encore où la chose se passerait, et qu’il lui fallait auparavant que de ressusciter le cadavre, trouver le cadavre lui-même !

— Oh ! oh ! fit-on de toutes parts, si on ne sait pas encore où on a enterré Lazare, nous avons le temps d’attendre qu’il sorte du tombeau !

— Pas si longtemps ! répliqua Teramo-Girgenti en faisant taire tous ses contradicteurs d’un geste légèrement impatienté… car je saurai où se trouve ce cadavre dès ce soir même… je l’ai promis au roi Mystère !

— C’est donc un cadavre qui intéresse beaucoup le roi ?

Beaucoup ! C’est le cadavre de sa mère !

Le comte avait prononcé cette dernière phrase d’une voix où se révélait une si étrange émotion que chacun eut le pressentiment qu’on n’était point venu seulement là pour dîner et qu’on allait certainement assister à quelque événement inattendu. Le dîner, du reste, était déjà fortement avancé. On déserta les deux autres tables pour venir écouter Teramo-Girgenti qui, disait-on, allait faire d’intéressantes révélations sur le roi des Catacombes… Tous les convives, déjà, le lui demandaient, le pressaient. Puisqu’il était si documenté sur le fameux R. C., qu’il leur dise tout de suite son histoire. Elle devait être merveilleuse…

— C’est qu’elle n’est pas précisément gaie, dit le comte.