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Page:Leroux - Le Roi Mystère.djvu/33

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Que voulait-on faire d’eux ? Quel allait être leur sort ?

Ils virent qu’on soulevait la trappe de la cave et peut-être pensèrent-ils que leur dernière heure était venue, car, sous leur bâillon, ils soupirèrent. Ils ne furent un peu rassurés que lorsque, étant descendus tout au fond de cette cave, ils aperçurent sur le sol fangeux, à la lueur d’une lanterne brinquebalée par l’un de leurs oppresseurs, ils aperçurent, disons-nous, trois autres corps liés comme eux, mais auquel il ne paraissait point qu’on eût ôté la vie. Et ils remercièrent le ciel que, dans leur malheur, ils eussent, au bout de cette incroyable aventure, trouvé de la compagnie.

Au-dessus d’eux, la trappe venait de se refermer. Il n’y eut plus, autour de M. Prosper et de M. Denis, que de la nuit et du silence. Ils essayèrent de remuer et de se faire entendre de leurs compagnons de captivité, mais c’est tout juste s’ils sortirent de leurs bâillons un inutile vagissement, et les mouvements qu’ils tentèrent ne firent que resserrer les nœuds de leurs liens.

M. Denis était poursuivi par cette idée que la position qu’il occupait sur le sol fangeux de la cave était bien dangereuse pour sa santé, et il redoutait déjà d’attraper quelque mauvais rhume qui, tôt, dégénère en cette vilaine toux, laquelle avait conduit ce pauvre Marquis de l’échafaud dont il vivait, à son lit où il mourut.

On a facilement reconnu le Vautour et Patte d’Oie dans les vêtements dont ils s’étaient affublés pour ressembler le plus possible à M. Prosper et à M. Denis. Avouons qu’ils y avaient réussi.

Mais maintenant, le plus difficile de leur besogne restait à faire. Elle ne les effrayait pas. Le Vautour et Patte d’Oie, que nous apprendrons à mieux connaître, n’avaient peut-être jamais osé un travail aussi audacieux, mais ils en avaient réussi de plus difficile. Ce n’était cependant point chose banale que de se substituer aux aides du bourreau pour sauver Desjardies.

Le Vautour et Patte-d’Oie sortirent du Lapin-qui-fume par le passage de la Folie-Regnault.

Arrivés dans la rue de la Folie-Regnault, ils trouvèrent la rue barrée par une ligne de fantassins, baïonnettes au canon.

Les soldats semblaient garder une sorte de bâtisse qui avait bien la silhouette la plus bizarre et la plus sinistre du monde. D’abord, elle n’avait pas de fenêtre, elle n’avait pas de porte visible. On y accédait par un large porche qui donnait sur une cour.

Cette bâtisse semblait n’avoir que des murs et un toit. Mais quel toit ! Les choses doivent avoir leur destin, comme les hommes. La destinée de ce toit devait être certainement d’abriter le couteau de la justice ! Il l’annonçait à tous les passants, il le proclamait avec orgueil, il l’attestait hautement.

C’était, en effet un toit très haut, très aigu, taillé en biseau. Comme