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MYSTÈRE DE LA CHAMBRE JAUNE

« Vous comprenez, ajouta Rouletabille, que, couchant à côté de lui, je gênais particulièrement Larsan, cette nuit-là, car il savait ou du moins il pouvait se douter « que, cette nuit-là, je veillais ! » Naturellement il ne pouvait pas croire une seconde que je le soupçonnais, lui ! Mais je pouvais le découvrir au moment où il sortait de sa chambre pour se rendre dans celle de Mlle  Stangerson. Il attendit, cette nuit-là, pour pénétrer chez Mlle  Stangerson, que je fusse endormi et que mon ami Sainclair fût occupé dans ma propre chambre à me réveiller. Dix minutes plus tard, Mlle  Stangerson criait à la mort !

— Comment étiez-vous arrivé à soupçonner, alors, Frédéric Larsan ? demanda le président.

— « Le bon bout de ma raison » me l’avait indiqué, m’sieur le président ; aussi j’avais l’œil sur lui ; mais c’est un homme terriblement fort, et je n’avais pas prévu le coup du narcotique. Oui, oui, le bon bout de ma raison me l’avait montré ! Mais il me fallait une preuve palpable ; comme qui dirait : « le voir au bout de mes yeux après l’avoir vu au bout de ma raison ! »

— Qu’est-ce que vous entendez par « le bon bout de votre raison ? »

— Eh ! m’sieur le président, la raison a deux bouts : le bon et le mauvais. Il n’y en a qu’un sur lequel vous puissiez vous appuyer avec solidité : c’est le bon ! On le reconnaît à ce que rien ne peut le faire craquer, ce bout-là, quoi que vous fassiez !