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LA CANNE DE FRÉDÉRIC LARSAN

si absorbé qu’il ne vit pas un signe d’intelligence que Larsan adressait à un employé du chemin de fer, un tout jeune homme dont le menton s’ornait d’une petite barbiche blonde mal peignée. L’employé se leva, paya sa consommation, salua et sortit. Je n’aurais moi-même attaché aucune importance à ce signe s’il ne m’était revenu à la mémoire quelques mois plus tard, lors de la réapparition de la barbiche blonde à l’une des minutes les plus tragiques de ce récit. J’appris alors que la barbiche blonde était un agent de Larsan, chargé par lui de surveiller les allées et venues des voyageurs en gare d’Épinay-sur-Orge, car Larsan ne négligeait rien de ce qu’il croyait pouvoir lui être utile.

Je reportai les yeux sur Rouletabille.

« Ah çà ! monsieur Fred ! disait-il, depuis quand avez-vous donc une canne ?… Je vous ai toujours vu vous promener, moi, les mains dans les poches !…

– C’est un cadeau, répondit le policier…

– Il n’y a pas longtemps, insista Rouletabille…

– Non, on me l’a offerte à Londres…

– C’est vrai, vous revenez de Londres, monsieur Fred… On peut la voir, votre canne ?…

– Mais, comment donc ?… »

Fred passa la canne à Rouletabille. C’était une grande canne bambou jaune à bec de corbin, ornée d’une bague d’or.

Rouletabille l’examinait minutieusement.

« Eh bien, fit-il, en relevant une tête gouailleuse, on vous a offert à Londres une canne de France !