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Page:Leroux - Les Étranges Noces de Rouletabille, 1918.djvu/44

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LES ÉTRANGES NOCES

personnage avait dû rejoindre les muletiers à la première heure du jour. C’était un vieillard qui frappait par un certain air de majesté, bien qu’il fût habillé de haillons et qu’il marchât la tête basse et comme plongé dans un rêve…

Rouletabille se rapprocha d’Athanase :

— Qui est-ce ? demanda-t-il.

— C’est le bonhomme Cyrille, célèbre pour ses malheurs.

— Il a l’air, en effet, très malheureux, dit Rouletabille.

— Non, maintenant, la joie l’habite… Il a pu s’échapper des prisons d’Anatolie, et est revenu dans le pays qu’il n’avait point revu depuis la guerre de l’Indépendance.

— Et pourquoi vient-il avec nous ?

— Parce que, répliqua d’une façon assez mystérieuse Athanase… parce qu’il y a des raisons pour qu’il vienne avec moi…

Mais il ne s’attarda pas à l’effet produit par ces dernières paroles et continua :

— Voilà un homme !… On peut le dire : un homme qui a vu le monde dans sa jeunesse, qui a vécu en Bessarabie, à Odessa, à Galatz, à Bucarest, enfin à l’étranger et qui est revenu dans sa patrie quand il a eu compris pour quoi l’homme est né, c’est-à-dire pour la liberté. Il a travaillé jadis avec Levisky à l’organisation d’un comité révolutionnaire et, pour être libre dans ses actions, il a tué sa femme