Page:Leroux - Mister Flow.djvu/18

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Moi, je suis resté à cirer mes chaussures. Aujourd’hui, je revois mon client. Interrogatoire chez le juge. Il se remet à chialer. C’est une fontaine, ce bonhomme-là ! Le juge d’instruction a reçu une lettre du patron volé. C’est un monsieur très bien, un English, un baronnet qui, du fond de l’Écosse où il est retourné nourrir sa neurasthénie, trouve le temps de s’intéresser encore à sa fripouille de valet de chambre. Il supplie le juge d’avoir pitié d’un moment d’égarement, de sa part à lui, le baronnet. Il n’eût jamais dû déposer de plainte. C’est lui, le coupable ! Est-ce qu’il devait exposer son épingle de cravate à la convoitise de son domestique ? Il veut « sauver son âme ». Ah ! ces presbytériens ! À sa sortie de prison, il reprendra Durin à son service. S’il n’était retenu à Édimbourg par des affaires considérables, il eût déjà retraversé le « chanel », mais il sera en France au mois d’octobre. Il demande à Durin de lui pardonner, et il lui envoie une Bible.

Le juge rigole. Durin a réouvert ses écluses. On traînera l’affaire jusqu’au mois d’octobre. Le baronnet viendra réclamer son homme. On le lui rendra avec six mois de prison et sursis (première condamnation). L’avocat n’aura même pas à se lever : « Affaire entendue, maître »… Je f… le camp en claquant la porte.

Le lendemain, encore une lettre de Durin. La barbe ! Je décachette : a Maître, je voudrais vous dire un petit mot pour vos honoraires ».

On ne connaît pas son cœur. J’aime Durin. Je cours. Je voudrais être déjà en sa présence ; je