Page:Leroux - Mister Flow.djvu/189

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nager et elle assiste, ravie, à mes ébats ! Plus je patauge, plus elle semble heureuse, ce qui ne l’empêche pas de m’octroyer quelque caresse quand j’aborde la rive. Alors elle me félicite. Mais je la hais, car j’en suis à me demander si mon naufrage ne mettrait pas le comble à sa joie sadique. C’est une femme que je connais de moins en moins. Elle a l’air de s’abandonner et de ne pouvoir rien me cacher de son étrange personne, mais ses confidences, je le sens, ne sont jamais complètes. Et puis, elle doit mentir avec bonheur.

M’aime-t-elle ? Ne m’aime-t-elle pas ? Certes elle ne me hait pas, comme moi, par exemple, quand je cesse de l’aimer cinq minutes. Elle ne me ferait pas cet honneur ! Mais son grand amour n’est peut-être qu’une amusette, surtout à cause de mes angoisses. Plus d’une fois, quand je faisais le cynique, en beauté, pour qu’elle fût satisfaite de son œuvre, j’ai surpris son sourire. On a ce sourire-là en face des extravagances d’un homme qui vient de découvrir un monde nouveau au fond de son verre.

Mais revenons à notre affaire. Nous avons quitté le palace de Paris-Plage avec tous les saluts de la valetaille qui doit toujours attendre ses pourboires.

La nuit, dans un hôtel de second ordre, à deux pas de la cité Rougemont. Pourquoi ne pas être descendus dans un hôtel à l’intérieur de la cité ? Parce que le concierge couche dans une chambre donnant sur l’escalier de service d’Abraham. Dès dix heures. Nous sommes prêts. J’ai été ranger l’auto sur le boulevard, devant le théâtre des