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ROULETABILLE CHEZ KRUPP

Rouletabille, d’un coup d’œil aigu, s’était rendu compte de la disposition des lieux et de la place occupée par les personnages qui s’y trouvaient. Il dit à La Candeur :

« Tu vas me suivre, et quoi qu’il arrive, fais le sourd et ne te démonte pas !… »

À leur entrée dans la salle, les soldats qui s’étaient mis à fumer et à bavarder ne leur prêtèrent aucune attention. Seul, le pompier qui avait fini son rapport et qui s’était retourné les dévisagea assez curieusement.

L’air redoutable de La Candeur lui en imposa immédiatement, mais, comme Rouletabille se dirigeait vers le pupitre qu’il venait de laisser, le pompier ne put résister à l’envie de lui demander :

« Qu’est-ce que vous venez faire ici ? Votre section n’a rien à faire ici. »

Rouletabille lui montra d’un clignement d’œil le terrifiant La Candeur et prononça ce simple mot : Polizei ! (police)…

Aussitôt, l’autre, qui venait de voir passer l’Empereur et son cortège, imagina qu’il avait en face de lui de hauts personnages de la police occulte, et rectifia la position…

« Pas un mot ! lui souffla encore Rouletabille et laisse-moi faire mon rapport. »

Le pompier salua et Rouletabille se mit à écrire sur les feuilles de papier blanc qui se trouvaient là.

Chose singulière, lui qui avait plutôt une écriture petite et brouillonne, s’appliquait, cette nuit-là, à des caractères très nets, et, sans doute, craignait-il de faire des pâtés, car il n’avait pas plutôt tracé quelques mots qu’il prenait grand soin de les faire sécher sur le buvard qui garnissait le pupitre.

Il resta bien là dix minutes, pendant lesquelles La Candeur fronçait de plus en plus les sourcils, car il avait de plus en plus peur, et après lesquelles le reporter plia tranquillement la feuille de papier et la mit dans sa poche. Puis, avec la mine satisfaite d’un homme qui a achevé une corvée, il rejoignit La Candeur et lui dit :