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TO BE OR NOT TO BE

« Trop tard !… Nous sommes perdus !… »

Rouletabille le crut-il ?

Pensa-t-il, lui aussi, que tout était perdu ?… ou qu’il n’avait plus qu’un trop faible espoir de sauver Nicole pour courir le risque de la laisser encore vivante aux mains des bourreaux de sa race, gage formidable d’où dépendait peut-être le salut de la patrie ?…

Toujours est-il que sa main alla chercher derrière lui, sur la table de dessin, le lourd levier qu’il y avait déposé, et alors, silencieusement, héroïquement, et sans doute aussi pour que cette noble fille qui avait déjà tant souffert ne vit point venir cette mort qu’elle avait elle-même commandée, sournoisement, il frappa !…

Il frappa à la tempe !…

De toutes ses forces, il frappa !… Mais, ô horreur !… la malheureuse ne s’abattit point sous ce coup furieux… Elle tourna sur elle-même, s’accrocha à un rideau et poussa un gémissement effroyable…

Rouletabille dut répéter ses coups et elle tomba à genoux, la bouche ouverte, les yeux formidablement agrandis, fixant son assassin avec un regard de bête blessée à mort.. regard que l’autre ne devait plus oublier jamais…

Enfin, après un dernier et inutile effort qui la redressa en face du coup suprême, elle roula sur le parquet, et ne fut plus qu’une pauvre petite chose inerte sous les rayons glacés de la lune.

Rouletabille, tremblant d’horreur, avait encore son arme dans la main quand La Candeur apparut. Le géant recula devant la figure effroyable de son camarade, devant ce geste qui menaçait encore, comme s’il n’avait pas assez frappé, devant ce corps de femme qui lui barrait le chemin.

Dans le même moment, la clarté lunaire fut obstruée par une ruée d’ombres qui se précipitaient sur le perron et agitaient des silhouettés devant la fenêtre.

« Enlevons le cadavre », prononça Rouletabille d’une