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SUR MON CHEMIN

qui présente des courbes d’un rayon trop restreint pour des navires de la longueur du nôtre, qui est celle, d’ailleurs, des cuirassés ordinaires.

Quand nous pûmes sortir, vers quatre heures et demie de l’après-midi, de ces eaux qui nous avaient été trop hospitalières, ce fut un soulagement pour tous, et nous accueillîmes avec joie le roulis et le tangage qui nous saluèrent dès notre entrée dans l’estuaire de l’Elbe.

Chacun se fit alors un devoir de complimenter notre commandant sur son dévouement et son énergie. Le commandant Joseph Marchal est un sympathique. Depuis notre arrivée à son bord, il n’est d’amabilité qu’il ne fasse aux passagers, surtout dans les moments difficiles où ils ont le moins besoin d’être rudoyés. C’est un Alsacien. Voilà vingt-cinq ans qu’il navigue, quatorze ans qu’il se dévoue à la Compagnie transatlantique et cinq ans qu’il commande. À notre arrivée à Hambourg, je l’interviewai sur les causes de tant d’accidents dans un canal où il ne devait s’en produire aucun. En dehors de la mauvaise volonté des pilotes et de leur ignorance, il faut surtout s’en prendre aux courbes si nombreuses et si courtes qui ne permettent pas la plus légère vitesse et, par conséquent, qui empêchent de gouverner. Pour peu qu’il y ait du vent, c’est l’échouage sûr. Le commandant a interrogé à Hambourg des capitaines de grands navires, qui lui ont raconté des histoires à peu près semblables à la nôtre, quoique moins compliquées.