Page:Leroux - Sur mon chemin.djvu/301

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
287
EN ROUTE !

grande. Quelques voitures de course et quelques cycles engagés ont défilé devant le bureau des contrôleurs. Le bureau des contrôleurs, c’est une table sur l’herbe verte, installation sommaire due à l’ingéniosité des garçons du Matin qui n’ont jamais baladé leurs uniformes dans une salle de rédaction aussi exposée aux courants d’air. Les amateurs ne cessent d’arriver, qui, avec leurs breacks, qui avec leurs phaétons ; breacks et phaétons automobiles comme vous pensez bien ; ce n’est pas ici que l’on aurait le mauvais goût d’exhiber cet animal antédiluvien qui s’appelle le cheval et que Buffon dénommait la plus noble conquête de l’homme, dans l’ignorance où il était du carburateur.

Vous ne savez peut-être pas ce que c’est que le carburateur ? Alors, vous ne savez rien. Moi non plus, je ne sais pas ce que c’est qu’un carburateur, mais, comme tous les gens chics qui sont là dans des costumes automobilesques, les amateurs avec des complets gris poussière et casquette Nijni-Novgorod, les vrais, les « pour de bon », avec des surouets goudronnés et des masques troués de hublots sur la figure, des dames avec des cache-poussière beige et des voilettes aussi épaisses que de la toile à voile, comme tous ces gens savent, à n’en pas douter, ce que c’est qu’un carburateur, puisqu’ils en parlent tout le temps, je n’oserai jamais le leur demander. Comme ça, je n’aurai pas l’air d’un imbécile. Du moins, je me le figure.