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SUR MON CHEMIN

ger leurs amis, accaparer l’attention publique, perdre leur temps et leur argent. Car, une affaire d’honneur, ça coûte au moins dix louis. Quand on l’attrape à la fin du mois, c’est une catastrophe.

Pour moi, je les ai en horreur. Non point que, personnellement, elles m’aient été fatales. J’ai fait battre tous mes amis, et il n’en est résulté que d’excellents déjeuners. C’est comme reporter du duel que je leur en veux.

Nous sommes quelques-uns, dans les journaux, qui, dés qu’une affaire d’honneur est dans l’air, devenons tout à coup les gens les plus malheureux du monde. Songez que la rencontre ne saurait avoir lieu sans nous, et que, bien souvent, on ne nous prévient ni de l’heure ni du lieu. Tous les gend’honneur ne sont pas aussi délicats que MM. Pini et Casella, par exemple. Quand ils se battent, ceux-là, on le sait.

Mais il en est d’autres qui ont la rage de se couper la gorge entre eux et qui font tout au monde pour tromper notre habileté professionnelle. Nous n’osons plus dormir, à cause de l’heure matinale à laquelle certains ont pris la mauvaise habitude de se battre ; et, quand nous avons enfin deviné l’heure, il n’est point de méchants tours qu’ils ne nous jouent pour nous cacher le lieu : les landaus partent dans des directions inattendues et à une allure difficile à suivre. Mais on ne nous prend point sans vert, et nous aussi, pour ce jour-là, nous avons de bons